L’étonnant Peirani
La Thrill box de Vincent c'est sa boite à frissons, son soufflet tous azimuts qui pleure, gémit, se lamente, siffle et souffle, court ou long, asthmatique et gonflé, toutes voiles dehors, embarquement sans concession vers les horizons lointains de la musique qui se la coule douce mais jamais ne faiblit sauf à nous faire prendre les lanternes de bateau pour des vessies flottantes, alimente la vapeur des cheminées, avance dans le brouillard et troquet au bout de la rue. On adoooore.
Tête de pirate
Vincent s'est fait un look de pirate new-look, cheveux ras, filet de barbe et anneau à l'oreille gauche comme les marins de la flibuste. Avec ses pieds nus et son pantalon qui remonte à chaque tiré du soufflet on s'attend à le voir tout arrêter pour aller lessiver le pont. C'est nous qu'il lessive quand le vent s'est engouffré au point où tout s'envole et que le voiles propulsent le navire vers les quarantièmes rugissants.
Après chaque retour des boutons le tangage donné au corps délivré de ce grand corsaire nous fait remonter le déjeuner du tréfonds des tripes. D'autant qu'il nous les remue les tripes.
Le capitaine du navire nous donne les dernières recommandations pour ne pas se perdre en route, le voyage sera bref mais intense, donc ne négligeons aucun détail pour en tirer tout le profit nécessaire, la contrebande n'a pas toujours payé il ne s'agirait pas de se faire à nouveau refiler de la camelote frelaté. aucun risque j'ai tout vérifié il ne manque pas un boulon vous en aurez pour votre dose de frisson. Embarquement.
Avant que ne démarre la vapeur
Un long souffle presque rauque accompagne le démarrage des morceaux. Peirani ne part jamais sur les chapeaux de roue, il fait chauffer lentement la machine, nous prépare consciencieusement et ne lâche le morceau que lorsque nous sommes au bord du gouffre quasiment le souffle coupé tellement nous l'avons retenu pour ne pas perturber la lente rotation des lourdes bielles et cylindres du moteur. Le cargo est maintenant lancé il ne nous lâchera plus jusqu'à ce que nous ayons accosté. Pas fâchés d'arriver, exténués mais ravis.
Bien épaulé
Outre le talent et la tranquille assurance de Michel Benita à la contrebasse, Vincent bénéficie du compagnonnage d'un pianiste étonnant. Michael Wollny n'est pas seulement un accompagnateur, il compose plusieurs des morceaux et apporte un grain de folie mesurée et maîtrisée pour faire partir la formation tantôt dans des envolées sublimes qui explosent en polyphonies inattendues, tantôt vers des territoires plus apaisés qui soulignent la complexité sensible du tireur de soufflets.
Peirani, Wollny, Benita, la cohérence du trio nous réserve de délicieux flottements et de douces valses, l'accordéon revient toujours à la danse, trois temps, un deux trois, pour nous dire que le corps est là rattrapé par le frisson qui parcoure l'échine de la danseuse quand je pose ma main sur son dos.
Vincent Peirani: accordéon
Michael Wollny: piano
Michel Benita: contrebasse